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Réitérant son plaidoyer en faveur de la dignité et les droits dans le contexte de la réparation des préjudices perpétrés par le passé en Afrique, la présidente du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH), Amina Bouayach, a appelé, ce mercredi 30 avril 2025, à repenser la « justice réparatrice » dans la perspective des défis actuels de l'Afrique. C’était dans le cadre d’un message enregistré adressé aux participants à la séance de clôture du Forum africain des ONGs, organisé dans le cadre de la 83ème session de la Commission africaine des droits de l'Homme.

« Pendant des siècles, l'Afrique a porté les stigmates d'un système injuste » .... C'est en ces termes que Mme Bouayach s’est exprimée à l’ouverture de cette séance de clôture du Forum africain, “[un système] qui a fait de la traite des êtres humains la base de la création de richesses au prix d'énormes souffrances et tragédies africaines”.

L’injustice, les pratiques dégradantes et humainement inacceptables, l'esclavage, la traite des êtres humains, le colonialisme et d’autres formes d'asservissement et d'exploitation, ajoute la présidente de la CNDH, ont marqué le destin de générations entières et engendré de profondes cicatrices et de lourds effets suite à la privation de droits, dont les conséquences sont encore présentes aujourd'hui. 

Dans ce contexte, Mme Bouayach a souligné que la « diaspora » africaine est à la fois « une mémoire vivante des souffrances passées » et « victime d'une injustice persistante ».

Cependant, le souci de la réparation des préjudices soulève de nombreux défis : Le défi de la responsabilité, le défi des moyens et le défi de l'objectif ultime. Comme l'ont témoigné les expériences dans d'autres contextes, les réparations seules, sous quelque forme que ce soit, ne suffisent pas à guérir les blessures de l'histoire ou à éliminer les disparités qui existent aujourd'hui.

Outre la nécessité d'inscrire les réparations dans une trajectoire avec des objectifs à long terme et non comme un événement ponctuel, « tout processus de réparation doit reposer sur la participation active des groupes qui ont directement ou indirectement subi les dommages liés aux violations », a-t-elle déclaré, ajoutant que « leur participation n'est pas une simple nécessité, mais elle constitue essentiellement une reconnaissance explicite de leurs droits fondamentaux qui ont été violés ».

Selon la présidente de la GANHRI, les processus de justice transitionnelle en Afrique et en Amérique latine ont montré clairement que les mécanismes de la « justice réparatrice » peuvent être mis en œuvre et permettre d'atteindre les résultats escomptés. Dans le même contexte, elle précise que « les réparations des préjudices ne constituent pas uniquement une réponse à la douleur du passé, mais une partie intégrante d'un processus continu visant à établir des mutations structurelles durables et à refléter un engagement collectif à concevoir l'avenir sur de nouvelles bases et à construire une conscience collective qui rejette toutes formes d'asservissement et de violation de la dignité humaine ».

« La quête de justice aujourd'hui ne peut se limiter à une reconnaissance symbolique ou à des mesures isolées », poursuit Mme Bouayach, pour qui « la justice économique doit être au cœur des politiques de réparation”, avec tout ce que cela implique comme efforts de mise en place de programmes de développement durable destinés aux populations historiquement marginalisées, outre le soutien d'initiatives économiques, sociales et culturelles menées par des Africains, notamment à l'étranger.

Et Mme Amina Bouayach de conclure en mettant en exergue le rôle central joué par les INDH et les ONGs, qu'elle a qualifiées d'acteurs clés, dans la documentation des conséquences persistantes des crimes historiques et dans l’exigence d’engagements concrets dans les domaines de la reconnaissance, des réparations et des garanties de non-répétition. « Le rôle de ces instances est essentiel pour faire entendre la voix des victimes et de leurs familles, et élaborer des propositions précises sur les méthodes et les mécanismes de réparation ».
 

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